Breakfast on the Morning Tram
Sublime, tout simplement
Comment ne pas apprécier cette charmante ex-étudiante américaine en
littérature comparée à Paris, convertie au jazz au contact du saxo britannique Jim Tomlinson,
émule de Stan Getz, aujourd'hui son mari, arrangeur et producteur ?
Pour son dixième disque en autant d'années, le premier chez Blue Note, Stacey Kent continue d'affiner son jazz cool, proche de l'esprit «fausse ingénue» de Blossom Dearie. Breakfast on the Morning Tram réunit une poignée de bossas-novas (dont Samba Saravah de Baden-Powell, dans l'adaptation française de Pierre Barouh), deux chansons méconnues et joliment relues de Gainsbourg (Les Petits Riens, La Saison des pluies) et, intéressante surprise, quelques chansons originales assez finement tournées, véritables standards en devenir cosignés par Tomlinson et le romancier nippo-britannique Kazuo Ishiguro.
Petite Stacey deviendra grande ? Mais c'est fait : le moment est même venu où la lolita acidulée menace en chiffres de vente l'hégémonie «dianakrallesque». Ce qui ne va pas sans entraîner un glissement dans l'image de la féminité - en gros, le passage de la starlette hollywoodienne au garçon manqué, de Marilyn Monroe à Fifi Brindacier. Plus sérieusement, la «Stacey Kent touch» lorgne sans vergogne vers Blossom Dearie pour l'ingénuité sophistiquée, un peu vers Rose Murphy pour le côté Betty Boop, avec des relents folk à la Norah Jones pour faciliter la promo.
Cocktail à peu près irrésistible.