Magic
The Boss fort
Dentrée, le ton est donné. Un rock direct, furibard et sans fioritures,
taillé pour enflammer les stades avec ses riffs emphatiques et son
refrain en forme d'hymne fédérateur (Radionowhere). Pas de
doute. Springsteen signe son retour en force accompagné par les huit
musiciens de son groupe historique, le fameux E Street Band. Des
retrouvailles puisque le Boss n'avait plus enregistré avec ses
collègues de fortune depuis son album enregistré dans l'immédiat après
11-Septembre -The Rising (2002) - lequel marquait déjà la reformation du groupe après quinze ans de mise en sommeil.
Mais Springsteen évite heureusement l'écueil de la célébration
nostalgique avec ses vieux potes. Il a trop roulé sa bosse et toujours
refusé la facilité (comme la redite) pour sombrer dans une relecture
facile de ses heures de gloire. "Je voulais faire un album pop parfait" déclarait le Boss au magazine Rolling Stones.
Passés les trois premiers morceaux menés tambour battant, le pied sur
l'accélérateur, l'album trouve sa vitesse de croisière entre ballades
dépouillées et morceaux à l'évidence pop, légers, apaisées, presque
solaires (Girls in the summer clothes).
Fidèle à ses thèmes de prédilection, Springsteen conte, dans la lignée
des chanteurs folk de grand chemin, les laissés-pour-compte du rêve
américain, les destins brisés par la solitude ou l'irruption en ville
d'un vieil ennemi bien décidé à solder les comptes du passé (Your own worst enemy). L'auteur de Born in the USA,
tube mondial sur les traumas de la guerre du Vietnam (perçu à l'époque
comme un hymne patriotique) n'oublie pas l'actualité brûlante. Deux
chansons évoquent avec pudeur et subtilité le chaos irakien: Gipsy Biker, dédié à un ami mort au combat et Devil's Arcade sur le quotidien d'un GI dans l'enfer de Bagdad. A un an de l'élection présidentielle américaine (novembre 2008), "la conscience sociale de l'Amérique", selon la formule consacrée, repart donc en croisade.
Il sera en tournée aux USA durant cette campagne armé d'un album qui,
selon ses termes, parle de la subversion des idéaux et des traditions
de son pays...