Bertrand Cantat, artiste ou criminel ? Le web s’en mêle
Le vent l'emportera
Un artiste a-t-il le droit d’être un salaud? Un chanteur, a fortiori célèbre, peut-il se démarquer d’un crime qu’il a commis jadis? Vaste question, qui colle aux basques dès que l’on s’intéresse au phénomène tout récent — trois jours à peine — suscité par le retour via Internet du groupe de rock français Noir Désir. L’histoire est connue.
Alors, Bertrand Cantat, chanteur de Noir Désir, artiste ou assassin? De cette accusation, il a eu à répondre devant la justice lituanienne. L’homme a purgé sa peine. Il est aujourd’hui en liberté conditionnelle. En 2011, la durée officielle de sa peine aura pris fin. Pour de bon. Si d’ici là tout va bien.
Chanteur, Bertrand Cantat l’était de métier, avant son incarcération. Rien ne stipule qu’il ne puisse plus recouvrer son ancienne activité. Quel est le problème, alors? Car problème il y a. Ou plutôt malaise. Du moins pour nombre d’internautes — français pour la plupart — s’écharpant gaillardement par forums web interposés.
L’essentiel des débats tient à
une question: au vu de son passé criminel, Bertrand Cantat peut-il
décemment reprendre du service à la tête de Noir Désir? Il y a les pour
et les contre, forcément. La majorité des commentaires glanés sur les
sites web des principaux quotidiens français (Le Parisien, Le Journal
du Dimanche ou encore Le Monde) sont symptomatiques d’une tendance
propre à notre époque (lire ci-dessous): faire justice soi-même. Avec
un petit «j».
Où le fantôme de la guillotine fricote avec la notion
élastique de «respect». Où le plaisir immédiat de la musique prend
parfois des airs indécents.
«C’est inacceptable. Pour la famille Trintignant, en tout cas…», plaide cet internaute. Plus loin, «Noir Désir est mort avec Marie Trintignant». Déclaration sans appel qui côtoie des commentaires plus terre à terre: «Difficile de télécharger les titres. Le site du groupe est au bord de l’explosion.»
Sur la Toile, chacun a sa morale. «Le silence serait un engagement
plus fort», dixit un visiteur, qui admet avoir écouté les nouveaux
morceaux… Même idée, autre couleur: «Quand on prétend donner des
leçons, on donne l’exemple. En attendant, on la ferme.» Tout cela, dans
le fond, ne serait-il pas qu’une «indignation fantasmagorique qui n’a
pas lieu d’être»?
Tonalité idéologique, enfin, capturée sur lemonde.fr: «les bobos frémissent d’aise au retour de Cantat» lance un internaute. Réponse: «Allez écouter les relents fascisants de Sardou». Droite, gauche, droite… Plaies et bosses. Les morts sont enterrés, les vivants s’étripent. Ça finira bien par passer.