Les bas-fonds
Bravo, le Suisse !
Et oui c'est bien le spectacle de ce cher ami Libou auquel Le Temps consacre aujourd'hui tout un article :
"Aujourd'hui, sauf exception trash, on aurait plutôt la douleur
minimale, le chagrin souterrain. Rien à voir avec Les Bas-fonds, de
Maxime Gorki, tels que mis en scène par Gisèle Sallin. Collant à
l'époque bohème de la pièce, début XXe siècle, la directrice du Théâtre
des Osses propose un spectacle où les oubliés de la société préfèrent
boire, crier et chanter leur désespoir. Très vieux style et bruyant.
Mais la fougue et le feu de cette option charment un public gagné par
le tonitruant tremblement.
Noyés dans la vodka
En tout cas, Gisèle Sallin ne tord pas le cou
aux auteurs, qu'elle sert plus qu'elle ne s'en sert. En metteur en
scène scrupuleuse, elle veille à conserver les pièces dans leur
contexte. Liesse ou détresse, chaque scène a son flot de rires et
de larmes noyé dans la vodka. Une sorte de théâtre ethnologique, donc,
plus attaché à l'origine du texte qu'à sa résonance actuelle (...)
Et puis, dans ce tohu-bohu très proche de la version
cinématographique de Jean Renoir en 1936, il y a Louka, pèlerin des
grands chemins, qui sème la compassion comme d'autres réclament du
pain. Sur la scène de Givisiez, le personnage devient féminin.
Véronique Mermoud lui prête son sourire apaisé et livre un plaidoyer
convaincant pour l'amour de son prochain. Elle enseigne aussi à la
clique d'ivrognes les vertus de la foi. Chez Gorki, en 1902, rien de
postmoderne: on vit encore dans l'attente d'un messie. Reste à savoir
si ce sauveur sera spirituel ou politique...
Associé aux Osses depuis plus de dix ans, le
Belge Jean-Claude de Bemels loge les déshérités, non dans la cave de
propriétaires usuriers, mais dans un théâtre à l'italienne désaffecté.
Avec son rideau rouge élimé et ses cinq fauteuils rescapés, ce décor
saisissant raconte autant le feuilleton des squats romands de cet été
que la fin d'un théâtre classique. «Allons-nous vers une perte
d'affectation, de sens et d'identité du théâtre?» s'interroge Gisèle
Sallin dans le dossier de presse. Pas vraiment le temps d'y songer.
Nastia, Pépel, Satine et les autres déboulent avec force cris véhéments
pour nous dire, nous chanter leur tourment"
.
Alors, Libou, enfin heureux ? Tu vois que la roue tourne ;-)