Tintin interdit aux mineurs en Grande-Bretagne
Tintin est-il raciste ?
Les Anglais ont tiré les premiers! Le groupe américain
Borders a déplacé les exemplaires de Tintin au Congo jusqu'aux rayons
destinés aux seuls adultes après la dénonciation par la commission
anglaise pour l'égalité raciale (CRE) du contenu jugé raciste de la
bande-dessinée écrite par Hergé. Mais à l'heure où Hollywood s'apprête à porter Tintin sur
grand écran, ce politiquement correct a quelque chose de dérangeant.
Comme s'il fallait gommer les errements idéologiques du passé plutôt
que de les expliquer...
"Pour le Congo tout comme pour Tintin au pays des Soviets, il se
fait que j'étais nourri des préjugés du milieu bourgeois dans lequel je
vivais... C'était en 1930. Je ne connaissais de ce pays que ce que les
gens en racontaient à l'époque : "Les nègres sont de grands enfants,
heureusement que nous sommes là !", etc. Et je les ai dessinés, ces
Africains, d'après ces critères-là, dans le pur esprit paternaliste qui
était celui de l'époque en Belgique". Déclaration d'Hergé cité sur
la page wikipedia consacrée à l'album. Tout est dit, ou presque, par
l'auteur belge. Le propos très colonisateur de la première édition du
livre n'est que le triste fruit de l'éducation de l'époque. Agé de 22
ans, lors de la publication de la première édition du livre, il n'avait
pas le recul nécessaire pour apprécier la politique de la Belgique au
Congo. Lors de la seconde édition, en 1946, il gommera d'ailleurs
quelques scories colonialistes, par exemple lors du passage à l'école.
Néanmoins, à la re-lecture du livre aujourd'hui, pas de quoi fouetter un chat et hurler au racisme. D'ailleurs le propos de Tintin au Congo s'oppose à cette vision très manichéenne de l'analyse de la commission anglaise pour l'égalité raciale, Tintin luttant avec les élites noires du pays, contre les petites trafics de la mafia. Bien sûr, difficile de ne pas mentionner le passé de Hergé et ses activités pendant la seconde guerre mondiale - collaboration avec le journal Le Soir qui était aux mains des Nazis -. Mais non seulement, Hergé, par la suite, a dans de nombreux albums développpés une pensée tiers-mondiste (discours sur la traite des esclaves - Coke en Stock-, les mouvements de libération en Amérique du Sud - Tintin et les Picaros -), mais gommer toute pensée colonialiste, la réserver aux seuls adultes, ne peut provoquer que des effets pervers et une fascination pour l'interdit. Une explication de texte ou un simple avertissement comme avant les mangas d'Osamu Tezuka eux-aussi empreints d'un certain "exotisme" colonialiste, n'aurait-il pas été plus appropriée ?